Le chasseur immobilier ou chasseur d’appartement et la
loi Hoguet
Interrogée
sur ce point en 2008 par un député, la Ministre de la Justice de l’époque a
considéré que les chasseurs immobiliers ou chasseurs d'appartements pouvaient
être soumis à la loi Hoguet (Loi n° 70-9 du 2 janvier 1970) et à son décret d’application
(Décret n°72-678 du 20 juillet 1972)
qui réglementent les conditions d'exercice de l'activité desprofessionnels de
l’immobilier (Rep. Min. n° 20525, JOAN Q, 12 août 2008, p. 6987).
Il
s'agirait du cas où ces chasseurs immobiliers - chasseurs d'appartements se
livreraient à titre habituel à des opérations d'entremise énumérées à l'article
1er de la loi précitée, à savoir notamment, des opérations portant sur les
biens d'autrui et relatives à l'achat, la vente, l'échange, la location ou
sous-location, saisonnière ou non, en nu ou en meublé d'immeubles bâtis ou non
bâtis.
C’est
là une position logique puisque ces chasseurs immobiliers ou chasseurs d'appartements
interviennent alors sur le marché de l’immobilier en tant que professionnels de
l’immobilier répondant, de fait, à toutes les obligations légales régissant ces
professionnels.
En
effet, la Ministre constate que les chasseurs de biens, en pratique, effectuent
le plus souvent leurs recherches auprès des agences immobilières, se rémunèrent
par le biais d'un partage de la commission perçue par celles-ci et proposent
leurs services pour la négociation du prix et l'assistance dans les démarches
d'acquisition (promesses de vente ou d'achat, signature finale).
Dans
ce cas, ils doivent répondre aux conditions d'exercice imposées par la loi Hoguet, à savoir, notamment : détenir une carte professionnelle et justifier d'une
Garantie financière et d'une assurance Responsabilité Civile Professionnelle.
En
revanche, selon la Ministre, l'activité reste libre si la mission du chasseur
de biens est strictement limitée à l'exécution rémunérée directement par son client
d'une prestation de recherche d'un bien, cette activité demeure alors hors du
champ d'application de la législation.
Cette
analyse est claire… mais pourtant revendiquée par des (pseudos) chasseurs immobiliers
pour contourner la loi et, ce faisant, porter préjudice aux professionnels de l’immobilier
et aux acquéreurs.
En
effet, cette interprétation ministérielle laisse la porte ouverte à un exercice
de recherche immobilière pas des personnes, dans les faits, incompétentes.
Est-il
besoin pourtant de rappeler, à ce sujet, une jurisprudence classique :
« ... Se rend coupable d'exercice des fonctions
d'agent immobilier sans carte professionnelle le prévenu "expert
évaluateur" qui participe, même de façon occasionnelle ou accessoire, à
des opérations portant sur les biens d'autrui et relatives à l'achat ou la
vente ou la location-gérance d'immeubles et de fonds de commerce, procède seul
à la visite des lieux, et fait office d'intermédiaire lors des opérations de
négociation... »
(Cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre correctionnelle, 24 janvier 2001).
Il
va de soit que si des prétendues chasseurs de biens immobiliers ne signent pas
de mandat de recherche, c’est tout simplement qu’ils n’ont pas la possibilité de
le faire car il n’ont pas pu obtenir la Carte T, c’est-à-dire n’ont pas les
diplômes et/ou l’expérience nécessaire (exigés par la Loi Hoguet) pour se
présenter et agir comme de véritables professionnels de l’immobilier.
Ils
interviennent néanmoins sur le marché immobilier… générant ainsi une
concurrence déloyale envers les chasseurs immobiliers professionnels et au
détriment des acquéreurs qui, n’étant pas alors protégés par la Loi, notamment
en terme de rémunération, peuvent se faire abuser.
En
ce sens, ne relevant pas de la loi Hoguet, ces pseudos chasseurs immobiliers ou
chasseurs d’appartements facturent des frais de dossiers, de services et/ou frais de
reportage avant même d’avoir trouvé (le cas échéant) un bien immobilier…
Du
reste, quand bien même ne le cherche t-il pas une fois qu’ils sont rentrés
informellement en relation avec leur client - il n’existe pas dans ce cas de mandat tel que la
Loi l’exige pour les professionnels -, ils perçoivent une rémunération… alors même
que la loi Hoguet interdit ce type de rémunération aux professionnels de l’immobilier
qui eux, logiquement, ne peuvent prétendre à une commission qu’une fois leur
mission remplie, à savoir - conformément au mandat écrit qu’ils ont signé
ensemble - le jour où leur client devient propriétaire suite à la signature d’un
acte authentique de vente chez le notaire…
Ce
qui explique, corrélativement, que les chasseurs immobiliers détenteurs de la
Carte T, tout au moins ceux qui exercent leur activité dans le strict respect
de la Loi (tel est le cas des chasseurs immobiliers membres de la Fédération
Française des Chasseurs Immobiliers -FFCI) n’ont pas recours au frais de
dossiers, de services et/ou de reportage précités.
Il
en va de la protection de l’acquéreur considéré, à juste titre, par le
législateur comme un consommateur ne devant pas être abusé.
Voici la question du député :
M. André Wojciechowski attire l'attention de M. le
ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité
sur la situation juridique de la profession naissante de chasseur
d'appartements.
Cette profession, née de l'augmentation du marché de
l'immobilier, ne paraît pas entrer dans le champ de la loi Hoguet qui régit les
professions de l'immobilier citées par le texte : agents immobiliers,
mandataires en vente de fonds de commerce, administrateurs de biens-gérants ;
syndics de copropriétés.
Or le « chasseur » d'appartements » agissant comme un
prestataire de services n'intervient pas dans la conclusion de la promesse de
vente ou l'acte de vente.
L'acheteur et le vendeur s'accordant directement entre
eux après son intervention ; il n'y a pas de commission sur le prix de vente ni
d'achat, il n'est pas mandataire car il n'y a pas de mandat pour la recherche
de la visite.
Cette nouvelle profession est adaptée à l'évolution du
marché et à la recherche de produits rares et souvent de haute gamme.
Elle se surajoute donc en amont des professions de
l'immobilier existantes.
Il lui demande si, afin de lui permettre un
développement harmonieux, de permettre une meilleure protection des
professionnels et des clients potentiels, il ne serait pas souhaitable d'en
préciser les termes par des textes adaptés.
Voici la réponse ministérielle :
La garde des sceaux, ministre de la justice, fait
connaître à l'honorable parlementaire que si la mission du « chasseur de biens
» est strictement limitée à l'exécution rémunérée directement par son mandant
d'une prestation de recherche d'un bien, cette activité demeure hors du champ
d'application de la loi du 2 janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972.
Néanmoins, la pratique démontre que les chasseurs de
biens qui effectuent le plus souvent leurs recherches auprès des agences
immobilières se rémunèrent par le biais d'un partage de la commission perçue
par celles-ci.
Nombre d'entre eux se font conférer un mandat de
recherche par le client et proposent leurs services pour la négociation du prix
et l'assistance dans les démarches d'acquisition (promesses de vente ou
d'achat, signature finale).
Ainsi, les chasseurs de biens se livrent de fait à
l'exercice des activités mentionnées à l'article 1er de la loi du 2
janvier 1970 sans parfois être titulaires de la carte professionnelle et donc
sans justifier d'une aptitude professionnelle, d'une garantie financière ou
d'une assurance de responsabilité civile professionnelle.
Cette situation est préjudiciable tant aux clients
qu'aux agents immobiliers régulièrement inscrits.
Si les chasseurs de biens limitent strictement leur
activité à l'exécution de la prestation de service que constitue la recherche
d'un bien immobilier, il n'y a pas lieu de réglementer cette activité.
Si en revanche, ils se livrent aux opérations
d'entremise mentionnées à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970, ils
doivent respecter les dispositions de celle-ci ainsi que celles du décret du 20
juillet 1972. À défaut, ils encourent les sanctions prévues par ces textes.