La Loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques - dite Loi MACRON (publiée au Journal Officiel du 7 août 2015) - impacte de nombreux domaines, notamment divers pans du droit immobilier.

Parmi ceux-ci (nous aurons l’occasion d’en aborder d’autres dans les semaines à venir), la faculté de rétractation en matière de vente immobilière (voir les articles 82 et 210 de la Loi).

Afin de protéger toujours plus l’acheteur, le délai de rétractation - suite à la signature d’une promesse de vente ou d’un compromis de vente - est allongé.

De sept jours, le délai de réflexion de l’acquéreur passe à dix jours.

Il semble légitime, nous semble t-il, de s’interroger sur cette mesure.

Quel en est, en effet, l’intérêt réel ?

En pratique, très concrètement, avant de se rendre chez un notaire pour une éventuelle signature en vue d’un achat immobilier, un acquéreur a normalement muri sa décision : rien, personne ne l’oblige à acquérir un appartement ou une maison…

Il est vrai que la normalité est pour le moins difficile à cerner, évolutive selon les époques, fluctuante selon l’idéologie dominante.

Toujours est-il que, en la matière, de manière purement factuelle, un acheteur a d’autant plus eu le temps de murir sa décision (d’acheter ou pas) que la Loi ALUR impose désormais au notaire rédacteur de réunir de nombreux documents (tel était déjà le cas avant, mais cette loi à accentuer l’information délivrée aux acheteurs préalablement à la signature d’une promesse ou d’un compromis de vente) et que cette réunion allonge, de facto, la durée de la transaction, plus exactement le préalable à celle-ci.

De telle sorte qu’entre la visite d’un bien immobilier (et personne, bien sûr, n’obligeant un individu à s’engager dans un projet d’achat immobilier, à chercher un logement, encore moins à en visiter), la réflexion inévitable qui s’en suit, la formulation d’une éventuelle offre d’achat, une négociation quasi systématique (avant acceptation, si tel est le cas, de cette dernière) avec le vendeur, la mise en relation en suivant avec le ou les notaires, la préparation d’un projet de compromis (par usage par le notaire du vendeur qui doit donc, entre autre, réunir les documents précités imposés par la Loi ALUR sus-évoquée) et sa soumission à l’acheteur (via son notaire si ce dernier recours également à un officiel ministériel, comme cela se vérifie dans une majorité de cas) pour échanger sur les éventuels points d’achoppements, apporter toutes précisions, le cas échéant, nécessaires… le temps écoulé s’avère traditionnellement significatif…

A tout le moins ce temps est suffisamment important pour que l’acquéreur - avant même de se rendre disponible pour un rendez-vous de signature chez un notaire - se positionne en toute connaissance de cause, sans précipitation (cela est d'autant plus vrai pour les acquéreurs qui, soucieux de services, ont recouru à un professionnel - un chasseur immobilier en l'espèce - pour les conseiller dans leur projet d'achat, les aider à murir celui-ci en amont même de la recherche, puis chercher efficacement un logement correspondant donc à leurs attentes, le négocier et l'acquérir au juste prix. De la même manière que les propriétaires confient la vente de leur bien à des agents immobiliers également là pour les aider dans la finalisation de leur projet immobilier).

Toujours est-il que dans l’hypothèse où il n’en aurait pas été ainsi, le législateur permettait jusqu’ici à l'acheteur de se rétracter dans un délai de sept jours après la dite signature, sous réserve que celle-ci soit intervenue (faculté de rétractation dont ne bénéficie pas en revanche le propriétaire se séparant de son bien… Pour quelle raison a-t-il était décidé que droit de la consommation devait plus protéger l’acquéreur que le vendeur… alors que dans les deux cas, en matière immobilière - sauf cas spécifique du neuf et de la vente notamment en VEFA -, il ne s’agit pas de professionnels, c’est là une autre question… Laquelle vient renforcer l’idée, si besoin était, du caractère très conjoncturel de la normalité… et mettre en avant la dimension - forcément - idéologique des choix législatifs et/ou réglementaires).

A présent (depuis le 8 aout dernier), devant considérer que l’acheteur potentiel d’un logement n’avait donc pas le temps nécessaire de la réflexion, sous l’impulsion du Ministre de l’Economie, le législateur a augmenté ce délai de trois jours.

Est-ce conforme à l’esprit de la Loi MACRON, censée contribuer au dynamisme et au développement de l’activité économique, le temps (allongé ici… alors que dans ce cas précis l’acquéreur/consommateur était donc déjà particulièrement - mais tout aussi légitimement - protégé) nous le dira.

En synthèse :

Situation antérieure à la loi MACRON : avant le 08 août 2015

Un acquéreur non-professionnel qui achetait un logement profitait de la faculté de rétraction de 7 jours prévue à l'article L. 271-1 du Code de la Construction et de l'Habitation issu de la loi SRU.

Situation postérieure à la loi MACRON : depuis le 08 août 2015

Le délai de rétractation prévu à l’article 271-1 du CCH précité, dont bénéficie tout acquéreur non professionnel d’un bien immobilier à usage d’habitation, est dorénavant de 10 jours.