Crise du logement et baisse des prix de l'immobilier : la réponse de Nicolas SARKOZY soulève des questions.


Dans son allocution télévisée du 29 janvier dernier, le Président de la République a proposé que les propriétaires puissent augmenter de 30% la surface de leur bien immobilier : « Nous avons décidé que pour les trois ans qui viennent, tout terrain, toute maison, tout immeuble, verra ses possibilités de construction augmenter de 30 % ».

L’idée étant, ainsi, d’augmenter l’offre de logement et, (a priori) par voie de conséquence, de faire baisser les prix des biens immobiliers qui s’expliquent, en très grande partie, par une offre très insuffisante - par rapport à la demande actuelle… et qui, elle, ne cesse de croître - dans les grandes agglomérations.

Le Chef de l’Etat l’a affirmé clairement : "cela va augmenter considérablement le nombre de logements, donc cela fera pression sur les prix. Et, enfin, les prix de l’immobilier à l'achat, à la vente, et les prix à la location vont pouvoir baisser".

Qu’en est-il en réalité ?

D’une part, conformément à ce qui a été mis en place dans le cadre du Grenelle de l'environnement, le coefficient d'occupation des sols (COS) peut d’ores et déjà, pour les propriétaires de maisons individuelles, être bonifié de 30% dans la mesure où sont utilisés des matériaux écologiques. Cette mesure est également déjà applicable pour les logements sociaux.

Or, à ce double niveau, l’effet de cette mesure n’a pas changer la donne et, de fait, remédier (ne serait-ce que partiellement) à la pénurie de logement.

D’autre part, il n’est guère besoin d’insister sur le fait que les quartiers situés en hyper-centre ville des grandes agglomérations françaises ne pourront pas toujours, pour des raisons techniques et/ou des règles d’urbanismes, voir leurs immeubles automatiquement surélevés, quand ce n’est pas jamais pour certains quartiers historiques (le plus souvent en zone sauvegardée et sous le contrôle rigoureux des ABF : Architectes des Bâtiments de France).

Par ailleurs, et surtout, cette mesure risque même d’avoir un effet inverse à celui escompté.

En effet, en décidant d’autoriser à construire 30% de logements en plus sur un même terrain, c’est le propriétaire de ce dernier (particulier, entreprise ou collectivité locale) qui, potentiellement, va pouvoir tirer profit de cette augmentation en vendant plus chèrement son bien.

Résultat de la hausse du prix du foncier en découlant, les promoteurs pourront, certes, construire un peu plus de logement sur un même terrain… mais ayant acheté ce dernier plus cher, ils répercuteront inévitablement les prix sur les acquéreurs potentiels d’appartements... qui cherchent et chercheront toujours (en vain pour certains) leur futur logement tant les prix sont et resteront élevés et/ou s’endettent et s’endetteront toujours autant pour accéder à la propriété.

Car, bien sûr, les terrains recherchés par les promoteurs sont situés dans des secteurs où il existe une demande réelle, à savoir les bassins d’emplois, là où il y a du travail, des transports en commun, des commerces, des services publics, etc. donc dans les grandes agglomérations à l’activité économique dynamique. Tel est le cas, par exemple, à TOULOUSE et dans ses environs immédiats… où la rareté du foncier se paye le prix fort (avec, bien sûr, une répercussion sur les appartements qui y sont mis en vente et, de fait, la difficulté de trouver un logement) ; tellement rare, au demeurant, que les groupes de promotions recourent souvent à un chasseur immobilier pour trouver plus facilement des terrains.

Ailleurs, en zone (plus ou moins) rurale, dans les petites villes de provinces au tissu économique fragile, l’offre de foncier existe, mais les besoins de logements y sont parfois inexistants.

De fait, sans avoir à proposer une augmentation de 30% du COS, les prix y sont déjà, dans l’absolu, intéressants pour les promoteurs. Mais ces derniers n’acquièrent évidement pas de terrain dans ces zones, n’y envisagent aucun programme, puisque les appartements qui y seraient construits ne trouveraient en aucun cas preneur.

C’est la raison pour laquelle, la solution (difficile, bien évidemment, à mettre en œuvre, ne serait-ce que parce qu’elle doit s’inscrire dans la durée via des politiques publiques continues) ne peut passer que par la construction massive de logement assortie d’aides de l’Etat et collectivités territoriales. L’envisager en période de déficit budgétaire à combler, de politiques d’austérité à mettre en œuvre… semble pour le moins délicat.

Reste que l’Etat et les collectivités locales sont propriétaires de foncier et qu’à défaut d’allouer des aides financières, lui et elles pourraient céder une partie de ce foncier… sous réserve, bien sûr, que des logements (dont des logements sociaux) y soient obligatoirement construits.

Cette idée mise en avant, notamment, par François HOLLANDE, candidat socialiste à l’élection présidentielle, semble être, aussi, dans les tuyaux du gouvernement puisque le Secrétaire d’état au logement, Benoist APPARU, a également avancé le 30 janvier dernier (entre autre dans les colonnes du journal Le Monde), après l’intervention télévisée de Nicolas Sarkozy, que l’Etat devait fermement inciter plusieurs organismes publics (tel que le Ministère de la Défense ou encore Réseau Ferré de France) à vendre aux collectivités locales un nombre important de terrains leur appartenant et souvent inutilisé…

Finalement, l’idée avancée par le Président de la République a un avantage : elle ne coute pas un centime d’euro à l’Etat. Son caractère simple (simpliste ?) peut frapper également les esprits en période électorale…

Mais à y regarder de près, elle n’aurait/n’aura pour conséquence que d’enrichir ceux qui sont déjà propriétaires (tout au moins ceux qui peuvent accroître la surface de leur logement – maison individuelle - et ceux qui disposent de terrains - biens situés - à vendre) et n’engendrera en rien une baisse des prix de l’immobilier initialement voulue.

La crise du logement en France implique une politique structurelle volontariste de grande ampleur… elle ne peut se contenter d’effet d’annonce, aussi spectaculaire soit-il en apparence.