Droit - Jurisprudence : le droit à rémunération du professionnel de l’immobilier conformément au mandat le liant à son mandant – moyens de preuves.

 

L’agent immobilier qui effectue correctement son travail (recherche d’un client, négociation, etc.) doit - bien sûr - être rémunéré conformément au mandat qu’il a signé avec son mandant : propriétaire dans le cadre d’un mandat de vente ou de mise en location d’un bien ; acquéreur ou locataire dans le cadre d’un mandat de recherche.

Reste qu’il s’avère quelque peu un « sport national » - tout au moins dans les pays latins… et la France n’échappe pas à cette « règle » - que les particuliers (vendeurs ou bailleurs et futurs acquéreurs ou locataires) qui sollicitent un mandataire - agent immobilier ou chasseur immobilier -, pour les conseiller et concrétiser leur projet immobilier, tentent parfois, néanmoins, de contourner ce dernier, de l’évincer.

Le but étant d’éviter de lui verser ses honoraires… pourtant dus puisque contractuellement prévus entre eux (mandant et mandataire) en amont de la mission ; honoraires dus sous réserve, bien sûr, que la mission soit bel et bien remplie, devenue effective.

Si tel est le cas, le professionnel de l’immobilier doit alors prouver qu’il est à l’origine de la vente immobilière ou de la location du bien.

Et la jurisprudence, fort logiquement, lui donne raison si tel est le cas… y compris - entre autre - s’il n’y a pas forcément de bon de visite signé entre les parties concernées.

C’est ce qu’a eu à rappeler, par exemple, la Cour d’Appel de Douai (CA Douai, Ch. 2, sect. 2, 16 nov. 2010 ; R.G. n° 09/07094) où la preuve du travail accompli par l’agence immobilière a été apportée via différentes pièces/documents téléphoniques :

Aux termes d’un mandat non exclusif de location en date du 20 avril 2007, MM. A et P pour la SCI PLUTON ont donné à la SARL PIC TRANSACTIONS, représentée par Mme L, un mandat d’une durée de douze mois à l’effet de commercialiser au mieux de ses intérêts à la location le local commercial de 732 m² situé […] moyennant une rémunération égale à trois mois de loyer à la charge du preneur.

Le contrat précise que le mandant s’engage à s’interdire pendant la durée du mandat et dans les douze mois suivant son expiration, de louer directement à tout candidat locataire ayant été informé par PIC TRANSACTIONS de la mise en location des biens objet des présentes, ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui’ et prévoit qu’en cas de manquement par le mandataire à l’une de ses obligations, celui-ci sera tenu au paiement d’une indemnité compensatrice.

Il ressort des pièces produites qu’en exécution de son mandat, la société PIC TRANSACTIONS a réalisé des publicités et apposé un panneau avec ses coordonnées sur la vitrine du local.

Le journal des appels téléphoniques de l’agence démontre qu’elle a été contactée le 16 juillet 2007 par M. D puis le 17 juillet 2007 par M. Richard B, se présentant comme l’associé de ce dernier, lesquels ont indiqué être intéressés par la location du rez-de-chaussée et du sous-sol moyennant un loyer de 5.000 euro et ont demandé à être rappelés sur des numéros de téléphone portable ; que le 19 juillet 2007, Mme L a téléphoné à M. Serge P, père du gérant de la SCI PLUTON, qui lui aurait indiqué voir avec son fils Alexandre pour une confirmation de rendez-vous pour le lendemain puis lors d’un nouvel appel de son accord pour la location de la moitié du local pour l’installation d’un centre esthétique ; enfin que M. P (sans le prénom mais numéro de téléphone […]) et M. D l’ont rappelée à propos de la signature du bail.

Ce document émane certes de la société PIC TRANSACTIONS mais il est corroboré par la facture BOUYGUES TELECOM pour la période du 20 juin au 19 août 2007 de Madame L qui atteste que celle-ci a téléphoné au numéro donné par M. D ([…]) à neuf reprises entre le 19 juillet et le 1er août 2007 puis sept fois sur celui de M. P durant la même période.

Bien que la preuve de la réalisation de la visite organisée par la société PIC TRANSACTIONS ne soit pas rapportée par la signature d’un bon de visite, la télécopie en date du 20 juillet 2007, signée par M. Hédi D qui indique : « suite à notre rencontre de ce jour, je vous confirme ma proposition de 5.000 euro HT pour la location du rès de chaussée et le sous sol, plus le remboursement de la taxe foncière et le remboursement de l’assurance propriétaire des murs », soit les conditions fixées au mandat, confirme l’existence de la visite et le rôle d’intermédiaire joué par l’agence immobilière. Elle est, au demeurant, en totale contradiction avec l’attestation rédigée par M. D le 18 février 2009 aux termes de laquelle M. B et lui-même auraient négocié en direct avec Alexandre P.

Le nouveau bail signé n’est pas produit mais il n’est pas contesté qu’il l’a été par MM. D et B, gérants de la SARL HR FITNESS.

Ces éléments démontrent l’intention du mandant et de M. D d’évincer l’agent immobilier afin de ne pas lui payer la rémunération contractuellement prévue.

Le preneur n’ayant pas payé la rémunération prévue au contrat, c’est donc à bon droit que les premiers juges ont condamné la SCI PLUTON au paiement de l’indemnité compensatrice, prévue par la mandat à titre de clause pénale, égale au montant de la rémunération fixée soit 17.940 euro TTC ainsi qu’aux frais inhérents à la procédure d’injonction de payer (410,65 euro) dûment justifiés.

En l’absence d’autre demande, les intérêts sont dus à compter du 10 janvier 2008, date de l’ordonnance portant injonction de payer.